Vous vous souvenez peut-être de ma montée de lait suite à ma déception à la lecture du premier numéro de MédiaMatin Québec, le quotidien gratuit des lockoutés du Journal de Québec. Je n'y allais pas avec le dos de la cuillère. L'éditorialiste du Voir a assez bien résumé ma pensée cette semaine : "Tu peux sortir le gars du Journal de Québec mais tu peux pas sortir le Journal de Québec du gars". Pierre Mouterde, du webzine Presse toi à gauche!, défend un tout autre point de vue sur le journal des lockoutés. En fait, il ne se peut plus d'enthousiasme ! Son point de vue sur la question vaut la peine qu'on s'y attarde puisqu'il synthétise pas mal tout les bons côtés de l'affaire (mais sans l'ombre d'une once d'esprit critique). En fait, il dit en gros ce que j'aurais voulu dire... avant d'avoir lu le dit journal.
Prendre l'initiative
Pierre Mouterde souligne à juste titre l'audace et la créativité dont on fait preuve les lockoutés du Journal de Québec. Pour lui, ils ont pris le taureau par les cornes. En choisissant de publier un quotidien gratuit à titre de moyen de pression, au lieu d'une traditionnelle ligne de piquetage, les syndiqués ont, dit-il, "pris avec brio l'initiative". Alors que c'est la défensive et le sentiment d'impuissance qui domine dans le reste du mouvement syndical, "dans le cas du conflit au Journal de Québec, c’est l’intéressant : on ne baisse pas les bras avant d’avoir collectivement et sur un mode unitaire pris l’initiative et surtout montré au « boss » que les travailleurEs et salariEés sont essentiels à l’entreprise".
Pour Pierre Mouterde, les syndiqués du Journal de Québec nous montrent carrément la voie. "En se lançant dans l’aventure « d’un média moyen de pression », les syndiquéEs du Journal de Québec (...) nous montrent (...) qu’un patron n’est pas aussi puissant qu’on l’imagine et qu’on peut faire trébucher ses volontés autocratiques. Ils nous montrent (...) qu’en cette période de montée de la droite et de néolibéralisation grandissante, les syndicats du Québec ne sont pas sans moyens, condamnés perpétuellement à l’impuissance" écrit-il.
C'est vrai et, effectivement, ça tranche avec ce qu'on voit habituellement dans le mouvement syndical québécois. Reste à voir ce qui est exportable là dedans. En examinant attentivement la question on se rend compte qu'une foule de moyen de pression alternatif s'offrent aux syndiqués mais qu'ils impliquent presque tous de rompre avec la légalité. [Je ne pense pas nécessairement à des actions radicales de type sabotage; plutôt à des trucs dans le même esprit que la publication d'un quotidien alternatif comme moyen de pression, ex.: les chauffeurs d'autobus --qui ont si mauvaise presse-- pourraient envisager de faire rouler les bus gratuitement; les techniciens de Videotron auraient pu "débrouiller" le cable au lieu de le couper; etc.] Il faut voir jusqu'où les gens sont capable d'aller dans cette voie.
L'audace & la créativité
Think big, stie ! Pourrait être la principale leçon à retenir de ce conflit pour la gauche sociale et politique. Il est ironique que cette leçon soit donnée par un syndicat que d'aucun considèraient comme le plus pissou du secteur des médias (il faut d'ailleurs reviser ce jugement à la lumière du conflit actuel). Faire preuve d'audace et de créativité, miser sur nos talents, voir grand... C'est non seulement la leçon à tirer du conflit au Journal de Québec (qui est loin d'être terminé) mais aussi celle qu'on aurait pu tirer de toutes les batailles des dernières années.
Autre chose, il faut sortir de nos tours d'Ivoire et "aller au peuple". Les lockoutés du Journal de Québec ne sont pas allé s'enterrer dans Vanier, ils se rappelent à nos bons souvenirs tous les matins et ce à 40 000 exemplaires. Avec ou sans médias de gauche, il faut aller voir le monde et lui parler. Il faut rompre avec nos mentalités d'assiégés. La gauche (une partie en tout cas) a tenté de le faire pendant la campagne électorale. Il est désolant de penser que la dernière fois où elle était aussi massivement (et profondément) "allé au peuple" c'était avant le Sommet des Amériques (soit 6 ans auparavant). Et après on se surprend d'une certaine "montée de la droite..."
"Ne comptons que sur nos propres moyens" comme dirait l'autre, ça reste d'actualité, même en 2007. Et si on commençait par exister politiquement, dans la cité, à longueur d'année?
MISE-À-JOUR - Selon la Presse Canadienne, le ministre libéral Philippe Couillard aimerait bien MédiaMatin Québec, le journal des lockoutés du Journal de Québec. Couillard se défend bien de prendre position dans la partie de bras de fer que se livrent syndicats et patrons. Néanmoins, il considère que les salariés ont opté pour une méthode harmonieuse de faire connaître leur point de vue. «Ce que je remarque, et certainement ce que les citoyens remarquent, c'est qu'il n'y a pas d'ambiance de confrontation agressive ou violente dans ce conflit-là, peut-être à cause que le syndicat a choisi cet instrument qui est essentiellement un instrument pacifique de démontrer sa situation. Là-dessus, du point de vue de la paix sociale, cela rend service à tout le monde», a-t-il précisé. Ouch! Cliquez pour lire le texte complet...
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