vendredi 13 avril 2007

Y'en a qui ont du front...

Les rédacteurs du Monde ouvrier (le journal de la FTQ) ont publié en 'Une' un article expliquant le pourquoi du comment de l'appui de la centrale syndicale au PQ. Rien que du réchauffé. Sauf qu'en page deux se trouve un encadré qui se lit comme suit:

Une autonomie totale et entière

On vient de fêter le centenaire de la charte d’Amiens sur l’indépendance politique des syndicats. Un des éléments de cette charte engage les syndicats à ne pas confondre leur mission de défense des intérêts « matériels et moraux » des travailleurs et travailleuses avec la mission des partis politiques, quels qu’ils soient.

La FTQ s’inscrit pleinement dans cette tradition historique depuis qu’elle a retiré de ses statuts l’appui officiel au NPD en 1971. Le dernier Congrès de la FTQ (2004) a d’ailleurs réaffirmé « l’autonomie totale et entière de la FTQ à l’égard de tout parti politique ».

Mais l’autonomie politique n’est pas synonyme de neutralité. Notre autonomie signifie que nous intervenons dans les débats politiques (avec une plateforme électorale, par exemple) et que notre appui à un parti politique sera toujours ponctuel et conditionnel.

Plus d’une fois, la FTQ et ses syndicats affiliés se sont abstenus d’accorder leur appui à un parti lors d’élections (en 2003, 1998 et 1985). En 1985, la proposition d’appui au Parti québécois provenant du Conseil général avait été battue au Congrès extraordinaire par 58 % des délégués.

À d’autres moments de notre histoire, nous avons appuyé des partis parce que nous avons jugé que la situation politique l’exigeait. C’est pourquoi nous avons appuyé le Parti québécois en 1976, puis en 1981, 1989 et en 1994. De la même façon, nous avons appuyé à plusieurs reprises le Bloc québécois aux élections fédérales.


J'imagine que la majorité des syndicalistes qui vont lire ce texte n'y verront que du feu, la Charte d'Amiens n'étant pas une référence commune au Québec. Mais moi, mon sang de libertaire ne fait qu'un tour quand je lis ça...

La Charte d'Amiens est en effet l'un textes fondamentaux du syndicalisme révolutionnaire! Il s'agissait d'un accord entre syndicalistes français, essentiellement entre anarchistes et marxistes, pour laisser la politique partisane à la porte du syndicat. C'est l'un des actes fondateurs de l'autonomie des mouvements sociaux.

Il est ridicule, surtout dans le contexte, que la FTQ se réclame de ce texte. Lisez l'original, vous comprendrez :

La Charte d’Amiens

Le Congrès confédéral d’Amiens confirme l’article 2, constitutif de la CGT. La CGT groupe, en dehors de toute école politique, tous les travailleurs conscients de la lutte à mener pour la disparition du salariat et du patronat… ; Le Congrès considère que cette déclaration est une reconnaissance de la lutte de classe, qui oppose sur le terrain économique, les travailleurs en révolte contre toutes les formes d’exploitation et d’oppression, tant matérielles que morales, mises en œuvre par la classe capitaliste contre la classe ouvrière ; Le Congrès précise, par les points suivants, cette affirmation théorique : Dans l’œuvre revendicatrice quotidienne, le syndicalisme poursuit la coordination des efforts ouvriers, l’accroissement du mieux-être des travailleurs par la réalisation d’améliorations immédiates, telles que la diminution des heures de travail, l’augmentation des salaires, etc. Mais cette besogne n’est qu’un côté de l’œuvre du syndicalisme ; il prépare l’émancipation intégrale, qui ne peut se réaliser que par l’expropriation capitaliste ; il préconise comme moyen d’action la grève générale et il considère que le syndicat, aujourd’hui groupement de résistance, sera, dans l’avenir, le groupe de production et de répartition, base de réorganisation sociale ; Le Congrès déclare que cette double besogne, quotidienne et d’avenir, découle de la situation des salariés qui pèse sur la classe ouvrière et qui fait, à tous les travailleurs, quelles que soient leurs opinions ou leurs tendances politiques ou philosophiques, un devoir d’appartenir au groupement essentiel qu’est le syndicat ; Comme conséquence, en ce qui concerne les individus, le Congrès affirme l’entière liberté pour le syndiqué, de participer, en dehors du groupement corporatif, à telles formes de lutte correspondant à sa conception philosophique ou politique, se bornant à lui demander, en réciprocité, de ne pas introduire dans le syndicat les opinions qu’il professe au dehors ;

En ce qui concerne les organisations, le Congrès déclare qu’afin que le syndicalisme atteigne son maximum d’effet, l’action économique doit s’exercer directement contre le patronat, les organisations confédérées n’ayant pas, en tant que groupements syndicaux, à se préoccuper des partis et des sectes qui, en dehors et à côté, peuvent poursuivre en toute liberté la transformation sociale ".

Article 2, constitutif de la CGT,
modifié par le IXe Congrès de la Confédération,
Amiens, du 8 au 16 octobre 1906

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