jeudi 5 juillet 2007

MédiaMatin Québec : 2M de copies plus tard...

Le 2 000 000 exemplaire du MédiaMatinQuébec a été imprimé cette nuit. Selon l'éditeur, plus de 2 007 000 copies ont été distribuées à ce jour. Denis Bolduc, porte-parole des syndicats des bureaux, de l'imprimerie et de la rédaction du Journal de Québec, souligne que «dans un contexte normal, le temps serait à la réjouissance. Mais, malheureusement, le moment est plutôt à la désolation. Quebecor a plongé, sans raison valable, le Journal de Québec dans un conflit qui dure depuis maintenant onze semaines.» Onze semaines de lock-out, 50 éditions d'un journal parallèle, plus de deux millions d'exemplaires diffusés... Une occasion comme une autre de sortir l'un des textes que j'ai écrit pour l'Infobourg, un journal de quartier de Québec, sur les enjeux du conflit...

Convergence: l’offensive Quebecor



Le dimanche 22 avril dernier, Quebecor a mis les employés-es de la rédaction et des bureaux du Journal de Québec en lock-out. Par solidarité, les employés-es de l’imprimerie ont déclenché la grève. Cela n’a pas empêché la multinationale, qui avait préparé son coup de longue date, de publier son édition du lendemain. Par contre, personne ne s’attendait à voir les syndiqués-es lancer leur propre quotidien parallèle, Média Matin Québec. Retour sur les enjeux d’un conflit de travail.

(NLL) Le monde des médias est en profonde mutation. Les marchés ont tendance à se fragmenter et la gratuité s’impose de plus en plus auprès des nouvelles générations de consommateurs. Ceci rend difficile la rentabilisation de certains types de contenus tels que les grandes séries télé ou le journalisme d’enquête. Globalement, on peut dire que les développements technologiques des dernières années (Internet, téléphone sans fil, iPod, télé satellite, etc.) annoncent un changement de paradigme et un «rebrassage» des cartes entre les différents médias.

Dans la presse écrite, il devient difficile de produire un journal offrant de tout pour tout le monde, tout comme il n’est plus possible de se contenter de raconter ce qui s’est passé la veille. Puisqu’il faut payer, les gens en veulent pour leur argent et exigent du contenu exclusif à haute valeur ajoutée, comme par exemple des cahiers spéciaux, des dossiers, de l’analyse, des sondages, etc. Or, tout ça coûte cher à produire et les revenus, comme les tirages, ont tendance à stagner.

Thérapie-choc

Anticipant sur les tendances, l’empire Quebecor est en restructuration et impose une thérapie-choc à ses artisans-es, l’idée de base étant de réduire les coûts en multipliant les partages de contenu entre ses différents médias et en centralisant ce qui peut l’être (ex.: les nouvelles internationales). Le hasard et peut-être aussi la réputation des syndicats impliqués, qui ne sont pas reconnus pour leur militantisme, ont voulu que le Journal de Québec passe à la casse en premier. Quebecor veut, entre autres, délocaliser le service des petites annonces, mettre le service informatique en sous-traitance, abolir la semaine de quatre jours des journalistes, augmenter la proportion d’articles produits à l’externe et baisser les salaires. Rien de moins!

Le but ultime de Quebecor est de pousser encore plus loin la logique de la concentration des médias pour en arriver à abattre les cloisons entre toutes les salles de rédaction de son empire. Ainsi, le travail d'un-e seul-e journaliste servirait à l'ensemble du groupe. Bref, faire plus avec le moins de frais possible. De l’avis de plusieurs intervenants-es, cela porterait un dur coup à la diversité et la qualité de l’information, déjà passablement mises à mal.

S’il réussit, le coup de force de Quebecor aura aussi des impacts régionaux importants. Délocaliser certains services du Journal de Québec aura forcément un impact économique, car ça voudra dire pomper encore plus de fric en dehors de la région. On peut aussi anticiper une montréalisation encore plus poussée de l’information. Déjà qu’il n’y a que deux chroniqueurs du Journal qui sont basés à Québec et que leur salle de rédaction est moins importante que celle du journal Le Soleil, qu’est-ce que ça va être s’ils coupent encore? Le pire, c’est l’impact potentiel sur les autres médias: si Quebecor réussit, les autres n’auront pas le choix de l’imiter. Misère…

1 commentaire:

Katleen a dit...

Pour ma part, je ne lisais (et ne lis) que très peu le journal de Québec (préférant de loin le Soleil ou le Devoir!) car je trouve que ce dernier est quelconque et mise beaucoup trop sur les nouvelles de «presse à scandale».

Par contre, quand je suis arrivé au Cegep alors qu'il y avait des ex-employés qui distribuaient leur nouveau journal, le Média Matin Québec, j'en ai pris une copie, la curiosité l'emportant sur mon opinion du contenu habituel du journal pour lequel ces mêmes journalistes travaillaient habituellement.

Je dois dire que la diversité des articles, en plus du fait que les sujets de ces écrits concernent maintenant beaucoup plus ce qui se passe au Québec, et surtout, surtout, l'enthousiasme des gens qui distribuent ce média fait de ce moyen de pression une réussite totale! […de plus, dernièrement, j'ai emprunté une copie du Journal de Qc et j'ai été atterrée de la médiocrité des images! …je me suis habituée à la qualité de MMQ!]

L'audace et l'intelligence dont font preuve ces employés en trouvant un moyen de pression à leur mesure ne fait qu'ajouter à l'estime que je leur porte maintenant. Je dois dire que plusieurs des articles écrits dans le JdQ me portait quelque fois à croire que ceux qui y écrivaient était des pauvres clowns inconnus, dominés par une belle grande multinationale, publiant du scandale, beau, bas, pas cher, bref une coquille vide sous beaucoup de fioriture! …J’ai à présent découvert des journalistes d’expérience, entreprenants, résolus et surtout, plein de volonté et d’idées pour se renouveler, eux, et leur support médiatique.

Avec la concentration des médias qui cause déjà des répercussion à la diversité et à la qualité de l’information, je trouve que l’effort de ces journalistes pour (entre autre) garder leur emplois et leur journal au Québec, est digne de mention. Car, selon Sur les lignes, «Quebecor veut, entre autres, délocaliser le service des petites annonces, mettre le service informatique en sous-traitance, abolir la semaine de quatre jours des journalistes, augmenter la proportion d’articles produits à l’externe et baisser les salaires. Rien de moins!» [source : http://syndical.blogspot.com/2007/07/mdiamatin-qubec-2m-de-copies-plus-tard.html]

S’il advient qu'un jour ces deux rivaux trouvent un terrain d’entente, qu’ils «règlent» cette situation, je dois dire que je ne m’intéresserai pas plus au JdQ qu’avant (sauf peut-être par considération pour les ex-employées grévistes, maintenant réembauchés!), car Quebecor utilise une démarche beaucoup trop sale et intéressée, au dépend de son cœur - ses travailleurs - pour que je l’encourage, de quelconque façon que ce soit.

De plus, si je parlais à Daniel Paquet et Denis Bolduc (respectivement le rédacteur en chef et l’éditeur pour les 252 travailleur(euse)s en conflit), je leur dirais : «regardez la population qui vous appuie et, même si vous travaillez depuis 40 ans à ce journal, laissez tomber cette entreprise crasseuse et malsaine qu’est Quebecor! continuez ce que vous avez fondés ensemble! Après tout, le Journal de Québec n’est qu’un nom! …l’essence, l’âme de ce journal, c’est vous, travailleurs (journalistes, rédacteurs, imprimeurs, etc) qui l’êtes! et maintenant, vous faites partis du MMQ!

Il n’y a qu’un pas à franchir pour devenir officiellement le média, près de ses lecteurs, indépendant des grosses multinationales, et apprécié dans le Québec, que vous êtes déjà!»

En tout cas, peu importe leur choix, je leur dis bon courage dans cette bataille!