lundi 6 août 2007

À signaler - J’accuse... les marchands d’esclave et les clients mangeurs d’hommes

Un lecteur de ce blogue à eu la gentillesse de m'envoyer une excellent texte d'opinion paru dans Le Soleil de samedi mais qui n'a jamais trouvé le chemin de Cyberpresse (n'hésitez surtout pas à faire comme lui si vous voyiez de quoi d'intéressant passer qui m'aurait échappé!). Personnellement ça me rassure de voir des gens écrire ça, surtout que ça vient d'un prof de... gestion des ressources humaines!

J’accuse... les marchands d’esclave et les clients mangeurs d’hommes

Dans un article publié récemment par Le Soleil nous apprenions que le directeur général de la Fondation des entreprises en recrutement de main-d’œuvre agricole étrangère a décidé de ne plus recourir à l’aide des travailleurs saisonniers mexicains sous prétexte que ces derniers chercheraient à se syndiquer pour améliorer leurs conditions de travail.

À titre de professeur en gestion des ressources humaines nous ne cessons pas d’enseigner à nos étudiants qu’en ce début de XXIe siècle le principal avantage compétitif des organisations repose sur leurs employés et qu’en conséquence, nous devons apprendre à les considérer humainement en tâchant de respecter tout aussi bien leurs droits que leurs besoins et leurs limites aussi bien physiques que psychologiques.

N’est-il pas paradoxal de constater que simultanément certains hauts dirigeants décident pour leur part de se transformer en marchands d’esclave en reniant explicitement le droit des individus salariés de se regrouper en syndicat? Cela ne serait-il pas, finalement, que l’aboutissement ‘normal’ (mais abject!) d’une longue histoire ponctuée au fil des ans d’exploitation, d’insalubrité de résidences et de violence envers les travailleurs saisonniers en provenance d’Amérique latine?

En 1988 l’Organisation Internationale du Travail a publié en grande pompe une déclaration universelle relative aux principes et droits fondamentaux au travail vantant l’engagement des gouvernements, des organisations d’employeurs et des organisations de travailleurs de respecter la liberté d’association et la reconnaissance effective du droit de négociation collective.

Comment est-ce donc possible que presque 20 ans plus tard une telle ignominie soit encore permise sur ces terres que certains ont déjà qualifiées de ‘plus meilleur pays du Monde’?

Bien entendu les marchands d’esclave ne pourraient pas continuer leur œuvre de destruction massive en toute impunité s’ils n’étaient pas cautionnés par des millions d’autres supporteurs que sont les clients mangeurs d’hommes. Soucieux de payer leurs fruits et légumes au plus bas prix possible, ces clients ‘walmartiens’ ferment volontairement les yeux sur l’une des plus grandes atteintes à la liberté et à la dignité humaines au travail.

D’ici les prochaines semaines la Commission des relations du travail du Québec devra déterminer si les employés saisonniers d’origine étrangère travaillant dans les fermes québécoises ont bel et bien le droit de se syndiquer pour tenter d’améliorer leurs conditions de travail. En attendant ce jugement crucial nous ne pouvons que penser qu’en ce début de troisième millénaire l’avenir s’annonce décidément très sombre pour les ressources humaines et pour l’Humanité toute entière. Honte à nous tous, infâmes clients mangeurs d’hommes!


François Bernard Malo (D.Sc.)
Professeur de gestion des ressources humaines
Département des relations industrielles de l’Université Laval

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