Il n'aura fallu que sept heures de grève pour que la haute direction des Travailleurs unis de l'automobile (TUA) tombe d'accord avec Chrysler. Vu d'ici, le mouvement peut paraître intéressant: voilà un syndicat américain qui, après des années de léthargie, décide de frapper les grands patrons de son industrie et de recourir à la grève générale.
Le problème c'est que les TUA se battent avec l'énergie du désespoir pour sauver leur peau et que, ce faisant, ils acceptent de vendre leurs membres pour sauver les meubles. Bien sur, les TUA ont arraché une garantie de maintien de l'emploi chez GM (l'ont-ils obtenu chez Chrysler? On ne le sait pas encore) mais, en échange, ils ont acceptés une saloperie de clause orphelin --les nouveaux seront bien moins payés que les anciens-- et l'externalisation et la capitalisation des avantages sociaux de santé de leurs membres actifs et de leurs membres retraités. Concrètement, ce ne sont plus les compagnies qui vont devoir casquer pour les assurances mais un nouveau fonds autonome capitalisé. L'effet pour les compagnies c'est de changer radicalement leur passif --ils sortent une fois pour toute de leurs livres les milliards mis de côté pour les avantages sociaux de leurs employés actuels et passés, ce qui améliore grandement leur cote de crédit-- tandis que, pour les syndiqués, c'est l'incertitude totale quand à leurs soins de santé qui seront désormais soumis aux aléas de la bourse. Il est peut-être bon, au passage, de souligner que cet accord ne passe pas comme une lettre à la poste: 40% des syndiqués ont voté contre chez GM.
Les TUA ont-ils le choix? Pas vraiment. Premièrement, ils sont sur la pente des concessions depuis 25 ans. Deuxièmement, s'ils syndiquent les «trois grands» historiques, ils n'ont jamais réussi à mettre les pieds chez la concurrence (Toyota, par exemple, est «union free») ce qui leurs donne un avantage compétitif non-négligeable. Troisièmement, les «trois grands» sont en crise --ils ont collectivement une dette de 25G$-- et il y a de la restructuration dans l'air. Bref, il s'agit de «négocier» le régime minceur...
Ceci dit, tout cela rend les Travailleurs canadiens de l'automobile très nerveux. Le syndicat canadien est devenu indépendant des américains il y a une vingtaine d'années sur la base du refus des «concessions». C'était jouable à l'époque parce que les ouvriers canadiens jouissaient d'un certain nombre d'avantages comparatifs importants. Sauf que là, avec les nouveaux contrats, c'est fini, ils ne sont plus «compétitif». Le dollars canadien à parité avec le dollars américain fait que les syndiqués canadiens vont coûter aussi cher que les américains. Si, en plus, les «trois grands» réduisent radicalement à moyen terme leur coûts d'assurance santé au sud, les canadiens viennent de perdre l'avantage du système de santé public. Finalement, s'il y a des clauses orphelins en plus d'un plancher d'emploi au sud, c'est certains que les fermeture projetées se feront ailleurs qu'aux États-Unis. Et, à choisir entre le Mexique et le Canada...
Voilà pourquoi il est presque certain que l'on se dirige également vers des grèves dans l'auto au Canada lors des prochaines négociations. Ce sera la dernière négo de Buzz Hardgrove et il se refuse à quitter sur des concessions. Je mettrais ma main au feu que nous verrons bientôt des occupations d'usines en Ontario...
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