VALLÉE-JONCTION
Les travailleurs ont eu raison de rejeter l'ultimatum!
En rejetant l'offre "ultime" présentée par le négociateur patronal Lucien Bouchard (identique à l'offre "finale" qu'il avait faite il y a deux semaines), les travailleurs et travailleuses de l'abattoir d'Olymel à Vallée-Jonction, en Beauce, ont infligé un puissant camouflet aux patrons de l'industrie du porc et aux petits potentats locaux qui les soutiennent. Les capitalistes et leurs serviteurs insistent maintenant sur le fait que le vote a été serré, puisque c'est par une majorité de 52,9% que les syndiquéEs ont rejeté l'ultimatum. Évidemment, si le résultat avait été l'inverse, il n'y a personne parmi eux qui en contesterait la légitimité! L'ancien premier ministre péquiste aurait même sûrement déclaré que 52,9% représente une majorité "suffisamment claire" (si elle l'est pour un référendum sur la souveraineté, pourquoi ne le serait-elle pas pour une assemblée syndicale?).
Ce qui est sûr, en tous cas, c'est qu'il a fallu beaucoup de courage et de détermination pour que les travailleurs et travailleuses d'Olymel prennent cette décision. Pendant plus de deux semaines, après avoir rejeté l'offre "finale" (qui prévoyait une baisse de salaire de 30%!), ils et elles ont fait face à énormément de pressions de la part des patrons d'Olymel et de la Coopérative fédérée, des gros producteurs de porc, du gouvernement Charest et des petits notables locaux, comme la mairesse de Vallée-Jonction qui n'a jamais cessé de se mêler de ce qui ne la regarde pas (a-t-elle déjà mis les pieds dans un abattoir une seule fois dans sa vie, juste pour savoir de quoi elle parle?).
Malgré ces pressions, qui ont amené beaucoup de divisions dans les rangs des travailleurs et travailleuses, et malgré la confusion répandue par les cravatés de la haute direction de la CSN à Montréal qui sont débarqués en Beauce avec une proposition mitoyenne et qui se disaient même prêts à accepter une bonne partie des concessions exigées par la partie patronale sans même avoir consulté les membres du syndicat, les travailleurs et travailleuses d'Olymel ont choisi la dignité et ont encore une fois dit NON AUX CONCESSIONS!
Pendant deux semaines, ils et elles ont entendu les pires choses: qu'ils mettent l'industrie du porc et l'économie de la région en péril; qu'ils ne sont qu'une bande de sans-cœur pas éduqués qui devraient se compter chanceux de pouvoir travailler; qu'ils sont égoïstes et ne pensent qu'à leurs propres intérêts; et ainsi de suite (et les actionnaires et patrons d'Olymel, quant à eux -- et leur négociateur Lucien Bouchard -- on imagine qu'ils sont remplis de bonté et n'agissent que par altruisme?). Tout cela, de la part de gens dont la plupart ne "tofferaient"
pas une demi-heure si on les obligeait à travailler à l'abattoir!
C'est clair, les conditions exigées par Olymel sont inacceptables! Lucien Bouchard disait il y a deux semaines qu'il ne s'agissait que d'une faible perte de 50$ sur le chèque de paie hebdomadaire (lui qui facture quelque chose comme 400$ l'heure pour ses "services"), mais que cette perte est nécessaire pour la survie de l'entreprise. Or, en tenant compte de l'ensemble des bénéfices marginaux, notamment la
contribution de l'employeur au RÉÉR et l'assurance-collective, cela revenait à une baisse de 6$ l'heure au moins, soit 240$ par semaine avant impôt.
Dire à des employéEs dont une grande part ont donné plusieurs années de leur vie à une compagnie impitoyable comme Olymel que celle-ci va réduire sa contribution aux fonds de pension, c'est insultant. Dire à des employéEs d'un abattoir à cochons où les conditions de travail sont difficiles à l'extrême pour la santé que la compagnie va couper au niveau de l'assurance-collective, c'est rire du monde. Les chances de
se blesser en dehors du travail pour quelqu'un qui a donné un gros effort toute sa vie seront toujours plus grandes que pour ceux qui n'ont jamais fait autre chose que de pousser le crayon. Couper les salaires de 6$ l'heure, c'est montrer beaucoup de mépris envers les travailleurs et travailleuses.
Les patrons ont dit qu'en acceptant des concessions de cet ordre, les ouvriers et ouvrières de Vallée-Jonction seraient demeuréEs parmi les mieux payéEs de l'industrie. Mais qu'est-ce qui dit que la compagnie n'aurait pas redemandé d'autres concessions dans quelques années? Dans les années 1990, les travailleurs et travailleuses de l'industrie de la viande en avaient fait des concessions, en acceptant des ridicules augmentations de salaires. Mais la spirale des concessions n'a jamais cessé. Pourquoi donc en accepter plus?
La bande de salo-porcs à la tête d'Olymel avait son idée de faite. Dans une entrevue accordée à l'automne sur les ondes du Réseau de l'information, Réjean Nadeau, le pdg d'Olymel, dont le "charisme" rappelle celui d'un zombie affamé, affirmait qu'il faudrait réorganiser complètement la capacité de production de porcs au Québec. Pour atteindre la capacité de production des abattoirs de porcs des États-Unis, il en faudrait deux énormes au Québec. En effet, le porc québécois ne donnerait que 90% de
viande par rapport au porc américain. Pour lui, c'est de la productivité perdue. Ensuite, le gros abattoir de Red Deer en Alberta, dédié à l'exportation vers l'Asie, il faut le financer, d'autant plus qu'il ne peut pas produire à pleine capacité par manque d'employéEs compétentEs.
Quant à la mairesse de Vallée-Jonction, elle était prête à accepter un accroissement de la capacité d'abattage de l'usine, même si cela affecterait le traitement des eaux usées. Le ministère de l'Environnement a signifié qu'il était d'accord de l'accroître, mais sans préciser jusqu'à combien. Mais pour la compagnie, les calculs compliqués de ses économistes lui ont fait dire que la capacité concurrentielle de l'usine de Vallée-Jonction dépendait de concessions majeures chez les ouvrières et ouvriers. Autrement, la compagnie pourra trouver d'autres places où les employéEs accepteront des salaires de crève-la-faim et où la municipalité sera prête à accepter tous les coûts économiques et environnementaux du traitement des eaux usées pour construire des méga-abattoirs aussi gros qu'aux USA (Think Big, "Elvis" Nadeau!).
Et qu'ont fait les politicienNEs là-dedans? Ils et elles ont laissé aller Olymel parce qu'ils et elles sont d'accord avec cette compagnie. On le voit dans les différents documents du ministère de l'Agriculture. On s'y inquiète de la capacité concurrentielle de l'industrie du porc québécoise. Il faut comprendre que, depuis les années 1970, les gouvernements qui se sont succédé à Québec ont poussé pour le développement de cette industrie. Ils ont incité beaucoup d'agriculteurs à se spécialiser dans ce domaine. Les débuts ne furent pas faciles. Il y avait beaucoup de faillites chez les producteurs de porcs; beaucoup de suicides et d'autres problèmes personnels aussi. Les porcheries avaient souvent tendance à prendre en feu. Était-ce que les électriciens ne connaissaient pas l'électricité des porcheries? Toujours est-il que l'assurance payait. Les agriculteurs qui ont survécu à ces épreuves s'attendent à ce que le porc soit payant pour eux. Une réorganisation de l'agriculture vers d'autres productions ne se fait pas si facilement. Les agriculteurs, malgré leur faiblesse numérique, maintiennent un poids politique important dans les comtés dits "ruraux".
En passant, peut-on savoir où était le chef populiste et démagogue de l'ADQ, Mario Dumont, au cours des deux dernières semaines? Lui qui passe son temps à dire que les gouvernements devraient "mettre leurs culottes", ça a bien l'air qu'il ne sera jamais plus qu'un ti-cul en culottes courtes devant les gros capitalistes!
Le fait que l'ancien premier ministre péquiste Lucien Bouchard se soit investi à fond dans ce dossier montre que la bourgeoisie québécoise prend cette affaire au sérieux. Le ministère de l'Agriculture avait piloté à distance la fusion entre Olymel et le Groupe Brochu pour créer la super compagnie que nous avons maintenant. Qu'il allait y avoir une restructuration immense de l'industrie porcine, c'était écrit dans le ciel.
Les conditions d'un millier de travailleurs et travailleuses importent peu là-dedans.
Il s'en trouve encore dans la "gauche" qui voudraient nous maintenir à la remorque de la bourgeoisie en nous faisant accroire que les élections et l'indépendance du Québec vont régler nos problèmes. Un des champions de "l'autonomie du Québec", Lucien Bouchard, vient de faire la sale job pour la bourgeoisie québécoise. L'autonomie que ces gens-là proposent n'ira jamais plus loin que celle autorisée par l'impitoyable loi du marché capitaliste, qu'ils ne cessent de vénérer: c'est dire que cette "autonomie" ne vaudrait pas grand chose de plus que ce bout de papier sur lequel
le même Lucien a déjà griffonné sa phrase célèbre ("Que ça continusse!"), il y a de ça quelques années.
La bourgeoisie québécoise est l'ennemie des travailleurs et travailleurs du Québec. Il y a de plus en plus de prolétaires en colère qui se disent que les porcs à abattre, on ne les retrouve pas seulement dans des porcheries et des abattoirs mais aussi à Westmount, Outremont et les quartiers riches des villes de banlieue et dans les régions. Les travailleurs et travailleuses de Vallée-Jonction avaient déjà accepté des concessions. Ils et elles étaient tannéEs de faire des concessions pour des capitalistes sans cœur. Ils et elles ont eu raison de rejeter cette offre pourrie!
Le capitalisme n'a pas plus de respect pour les travailleurs et travailleuses que pour la nature. Il est temps de se débarrasser de ce vieux système fini! Dans les prochains jours, les politicienNEs vont parler de relance économique régionale et d'autres illusions du genre. Il commence à être temps qu'on cesse de croire à leurs mensonges et qu'on se mette à la tâche de construire le grand mouvement de résistance dont on a besoin, pour les dégommer du pouvoir!
- De notre correspondant
Texte extrait de ARSENAL-EXPRESS, N° 128 - Le 11 février 2007
DERNIÈRE HEURE
Au moment même où nous nous apprêtions à émettre cette édition d’Arsenal EXPRESS, nous apprenions que les travailleurs et travailleuses d’Olymel sont de nouveau convoquéEs en assemblée générale, mardi matin, pour se prononcer sur une nouvelle proposition préparée par le conciliateur du ministère du Travail. On verra bien, à l’assemblée générale, ce que cette « nouvelle proposition » contient, mais ça commence drôlement à ressembler aux référendums sur la souveraineté : tu dis « non » une fois, deux fois, trois fois avant de finir, par lassitude, par voter oui… et après, on te dira qu’il est trop tard pour changer d’idée!
Apparemment, c’est ça qu’ils appellent la démocratie : on t’enfonce le couteau dans la gorge et on appuie à chaque jour un peu plus, jusqu’à ce que tu finisses par dire « chute, mon oncle Lucien »…
mardi 13 février 2007
Olymel : saluons le courage et la détermination
Une fois n'est pas coutume, je me permet de reprendre l'intégral d'un texte diffusé par le bulletin maoïste ARSENAL-EXPRESS. Il se trouve que, pour l'essentiel, je suis d'accord avec ce qu'ils ont à dire sur Olymel. Pourquoi se casser le bicycle à réécrire une analyse si le correspondant d'ARSENAL-EXPRESS dit déjà ce que j'aurais aimé dire? C'est un mao qui l'a dit et moi pas... Ouain, pis?
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